Dernière modification 25/09/2023

A quoi sont dues les pertes du moteur thermique qui nuisent à son rendement ?


Visant à exploiter une énergie mécanique à la suite d'un processus chimique (la combustion est en effet une réaction d'oxydation rapide qui se produit entre le carburant et l'oxygène de l'air), le moteur à combustion interne est une technologie qui perd du terrain par rapport à l'électrique en raison de son rendement bien inférieur (à lire : comparaison du rendement des moteurs électrique et thermique). Avec la montée en puissance des véhicules électriques, l'étude des diverses sources de pertes dans les moteurs thermiques devient d'autant plus intéressante. Cet article vise donc à lister les différentes raisons qui mènent le moteur thermique à avoir autant de pertes entre l'énergie contenue dans le carburant et la force mécanique qu'on obtient au bout du vilebrequin.

Effet de Pompage

L’effet de pompage dans un moteur à combustion peut être comparé à l’utilisation d’une pompe à vélo ou de tout autre élément qu'on peut remplir d'air. Tout comme il faut effectuer un travail pour aspirer de l'air à l'intérieur de la pompe avant de le transférer dans un pneu (qui entre par un petit trou), les moteurs doivent fournir un effort (et donc une perte) pour aspirer l'air avant de l'envoyer dans les chambres de combustion. Ce processus implique des pertes dues au papillon des gaz qui constitue un goulot d'étranglement. Ce phénomène est largement accentué sur les moteurs essence qui imposent un mélange stœchiométrique air-carburant bien plus contraignant. Quand le papillon est partiellement ouvert, l'air entre plus difficilement dans le moteur. Le piston qui aspire l'air (car c'est la descente de ce dernier qui sert de pompe), il est ralenti par cette contrainte (ce qui se caractérise donc par une perte).

 

L’effet de pompage peut entraîner des pertes d’environ 5 à 10% de l'énergie fournie, surtout à bas régime et à charge partielle.

Compression et dilatation des gaz

La compression du mélange gazeux dans les cylindres (un des 4 temps du moteur) requière une quantité significative de travail. Cela signifie qu'une partie de l'énergie est utilisée pour comprimer le mélange air-carburant avant l'allumage. Attention toutefois à la subtilité, car un taux de compression élevé amène un meilleur rendement ...

Les pertes dues à la compression du mélange air-carburant peuvent s’élever à environ 10% de l'énergie totale produite, variante selon la conception du moteur et son état.

Masse des pièces mobiles

La masse des pièces mobiles telles que les pistons, les bielles, le vilebrequin, la distribution est un autre facteur contribuant aux pertes mécaniques dans les moteurs. L'inertie de ces pièces, liées directement à leur masse, induise une force résistive qu'il faut vaincre et qui se caractérise donc par des pertes. C'est pour cela qu'on cherche à installer des pièces légères dans les moteurs haute performance, et les pièces forcées permettent de contribuer à cette baisse de poids.

L’inertie des masses des pièces mobiles peut consommer environ 5% de l'énergie totale produite, dépendant de la conception du moteur et des matériaux utilisés.

Frottements

Les frottements internes entre différentes pièces mobiles, telles que les segments, les queues de soupapes, les paliers, induisent des pertes mécaniques significatives. Ces frottements créent une résistance qui doit être surmontée, consommant ainsi une portion de l'énergie utile produite par la combustion. On réduit alors le nombre de cylindres pour réduire la surface totale de frottement par rapport à la cylindrée (à lire : avantages et inconvénients des moteurs 3 cylindres / Fiabilité des 3 cylindres). On utilise aussi des procédé pour lisser au maximum le revêtement des cylindres avec le bore spray coating.


Les frottements internes entre les divers composants du moteur peuvent représenter des pertes d’environ 10 à 15%, voire plus, en fonction de l'usure et de la lubrification du moteur.

Accessoires

Les accessoires que le moteur doit entrainer, tels que l'alternateur, la pompe à eau et la direction assistée, qui sont entraînés par la courroie d'accessoires, absorbent une partie significative de l'énergie mécanique produite par le moteur, ce qui réduit d'autant le rendement global du système. Pour limiter le phénomène on cherche à débrayer au maximum ces accessoires quand il n'y en a pas besoin. On cherche aussi à électrifier un maximum d'entre eux pour qu'il y en ait le moins possible reliés à la courroie, et le but est qu'il ne reste que l'alternateur à faire tourner.


L'entraînement des accessoires par le moteur peut s'accaparer de 5 à 15% de la puissance du moteur, selon le nombre et le type d'accessoires en fonctionnement.

Pertes thermiques

Une grande partie de l'énergie produite par la combustion du carburant est perdue sous forme de chaleur (quand il y a combustion on obtient deux choses : une force de travail incarnée par la dilatation des gaz et de la chaleur). Cette chaleur est soit évacuée par le système de refroidissement, soit perdue à travers les parois du moteur (dans lesquelles circulent le LDR), contribuant ainsi à une baisse d'efficacité énergétique. Les lois de la thermodynamique précisent qu'aucun système mécanique ne peut atteindre une efficacité de 100%, et dans les moteurs à combustion interne, une grande partie de l'énergie est irrémédiablement transformée en chaleur. C'est donc ici la principale perte des moteurs thermqiues, et pour l'éviter il faudrait arriver à produire des combustions froides ... Pas facile ! Le rendement maximal atteint sur des moteurs thermiques (dans l'industrie, pas dans les voitures) atteint 50%.

Les pertes thermiques sont généralement les plus significatives. Elles peuvent atteindre environ 60 à 70% de l'énergie totale produite par la combustion du carburant. Cette énergie est principalement perdue à travers les gaz d'échappement et le système de refroidissement.

Pertes par échappement

L'évacuation des gaz de combustion entraîne également des pertes substantielles d'énergie, à la fois sous forme de chaleur et de pression résiduelle dans le cylindre, qui est évacuée plutôt que convertie en travail utile. C'est donc grâce à ce phénomène que le turbo arrive à améliorer significativement le rendement des moteurs. Notez que les pertes sont accentuées quand il il a des éléments résistifs sur la ligne, comme les catalyseurs et FAP.


A lire : pourquoi les moteurs turbo consomment moins ?

Rendement

En fin de compte, les moteurs à essence et diesel affichent des rendements thermodynamiques qui varient respectivement entre 25-30% et jusqu'à 40% (à lire : les nombreuses différences subtiles entre essence et diesel). Cependant, le rendement réel lors de l'utilisation quotidienne est souvent bien moindre (en moyenne 20% même si votre moteur culmine à 40%), étant donné que les pertes liées aux rapports de transmission induisent que le moteur opère rarement à son régime optimal de rendement.

A lire aussi : au delà des pertes, de quoi dépend aussi le rendement d'un moteur ? Découvrez les autres facteurs (taux de compression, richesse, température moteur etc.)

Plus de 100% de perte en cumulé ?

Vous avez tout mis bout à bout et vous arrivez à un total de plus de 100% ? Vous vous interrogez ?

Attention, les valeurs de perte ne peuvent s'additionner aussi simplement car elles fonctionnent de manière synergique au même moment. Il peut sembler contre-intuitif de cumuler plus de 100% de pertes, mais ce qui est important de comprendre ici, c’est que ces pourcentages ne sont pas calculés sur la même base et ne s'additionnent pas de manière linéaire. Chaque type de perte est calculé par rapport à l'énergie disponible après les pertes précédentes, et non par rapport à l'énergie initiale totale du carburant.

Conclusion

L'analyse détaillée des sources de pertes dans les moteurs à combustion interne met en lumière leur inefficacité intrinsèque par rapport aux moteurs électriques, qui peuvent convertir jusqu'à 90% de l'énergie électrique en travail mécanique. Alors que la transition vers les véhicules électriques s'accélère, la compréhension de ces pertes est essentielle pour permettre de comprendre pourquoi le moteur thermique n'a pas vocation à rester indéfiniment dans l'histoire humaine pour la production de travail mécanique (et ce malgré l'attachement de beaucoup à ce mode de propulsion).

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Dernier commentaire posté :


Par sergiof (Date : 2023-10-04 16:12:13)

Article intéressant qui finit par une conclusion favorable à la voiture électrique (on ne s'y attendait presque pas) passant pudiquement sous silence les pertes catastrophiques d'énergie électrique à chaque phase de conversion, transport, stockage etc

Il y a 4 réaction(s) sur ce commentaire :

  • Par murm (2023-10-06 00:07:47) : Bonjour,
    Ça tombe bien je viens quasiment de proposer ce cas à mes élèves donc je n'ai pas à chercher les chiffres pour étayer votre propos :

    Conso e-308 (donnée fiche-auto) 18.5kWh
    rendement batterie 0.95
    énergie batterie (18.5/0.95) 19.47
    rendement recharge (donnée fiche-auto) 0.88
    Donc conso borne (19.47/0.88) 22.12 kWh
    rendement ligne basse tension (décla ERDF) 0.94
    donc conso au transfo (22.12/0.94) 23.54 kWh
    Rendement lignes HT (décla RTE) 0.98
    donc il faut balancer (22.36/0.98) 24.02 kWh dans les lignes

    ces 24.02 kWh sont produit (en France selon RTE) à base de :
    - 62.7% de nucléaire qui a un rendement estimé à 33%.
    - 11.1% de fossile qui a un rendement estimé à 35%
    - 26.2% de ENR qui ont un rendement estimé à 45% (merci l'hydraulique)

    Donc on sépare ces 24.02kWh en conservant les proportions annoncées par RTE et en appliquant les rendements et on obtient :
    - 43.36 kWh d'énergie nucléaire nécessaire
    - 7.24 kWh d'énergie fossile nécessaire
    - 13.34 kwh d'énergie renouvelable nécessaire

    Soit un total de 64 kWh nécessaire à produire pour faire avancer la e-308 sur 100km.

    Bon après je partais sur le calcul de l'empreinte carbone donc j'ai pas d'autres chiffres et pas envie de les chercher mais pour faire la comparaison vite fait :

    La 308 110cv essence consomme 6.7L/100 (donnée fiche auto)
    1L d'essence contient 3.36x10^7 J (wiki)
    donc 6.7L d'essence contiennent 22.51x10^7 J soit 225 MJ
    On convertit les MJ en kwh et on obtient une conso totale de 62.5kWh/100km pour la 308 essence.
    (chiffre qui du coup ne compte pas l'acheminement, la distribution etc)
  • Par Fab i trois TOP CONTRIBUTEUR (2023-10-06 14:11:59) : Bonjour,

    Excellente démonstration même si quelques points méritent d'être éclairés :

    > il me semble que la consommation wltp d'un BEV inclut une partie de la consommation de la recharge mais je ne sais plus dans quelle proportion toute ou partielle, dès lors la consommation réelle de la batterie embarquée aux roue en passant par le moteur et l'onduleur-hacheur d'une voiture électrique donnée est théoriquement inférieure à la valeur wltp. Par exemple sur la mienne je suis à une moyenne de 15 kwh/1oo km ordinateur de bord sur 12500 km alors que le constructeur m'indique 15,4-16,3 kwh/1oo km en cycle wltp pour mon auto. Par contre sur borne de recharge je peux bien faire le différentiel énergie appelée à la borne énergie réellement stockée dans la batterie et retrouver les données wltp ( difficile à la maison faute de prise de courant avec de comptage). Dès lors pour votre calcul suffit juste de prendre la valeur wltp sans y ajouter la rentabilité des process et motorisation électrique embarquée.

    > si l'acheminement et la distribution de l'énergie fossile d'origine pétrolière ne changera pas grand chose à la donne, rapport entre l'énergie utilisée et la quantité d'énergie potentielle transportée, les phases du Puits à la raffinerie, et des cuves de brut aux produits raffinés sont non négligeables, mais dès lors faudrait faire la même chose côté électrique.

    > le faible rendement d'une centrale nuc est liée à des raisons de sécurité et de sûreté ces dernières travaillant à des pressions et des t° moindre qu'une centrale thermique. En thermique on arrive maintenant à des rendements vers les 0,45, tandis qu'en éolien récent les 0,5 sont atteints voir dépassés, là où les champs initiaux tapaient entre 0,3 et 0,5.

    > Même si vous l'évoquez en fin de votre post, la raison d'être du retour des voitures électriques est la neutralité carbone et donc le souhait d'émettre le moins possible de co² et de gaz à effet de serre du Puit à la fin de vie en passant par la roue, là dedans la rentabilité énergétique n'a pu directement sa place sauf si ça amène à émettre des GES, dès lors c'est l'aspect de la rentabilité financière qui reprend le pas, à ce jeu là les ENR sont plaisantes, l'énergie fossile au top si on omet les GES et la filière nuc coûteuse mais peut être juteuse et permet en outre d'entrenir l'armement du même type.

    > En regard des ENR (énergie renouvelables) ont tend souvent à négliger l'aspect fondamental ayant prévalu à leurs mises en œuvre, une énergie inépuisable, renouvelable et gratuite, quand bien même le débit d'énergie proposée est fluctuant au gré de la météo et des saisons. Dès lors ces dernières sont plus cadrées par leurs rentabilité financières qu'énergétique avec actuellement la tentation pour les champs éoliens d'utiliser certaines de leurs phases ou périodes opérationnelles pour utiliser leurs productions d'électricité afin de produire et stocker de l'hydrogène.

    En conclusion, vous mettez bien en valeur le fait que réfléchir à la question est bien pluridisciplinaire et nécessite de maîtriser des bases simples mais fondamentales dans les domaines abordés.

    Cordialement
  • Par Admin ADMINISTRATEUR DU SITE (2023-10-07 15:05:34) : Sinon il y a un article sur ce sujet ici ;-)

    Une énorme merci à Fab qui amène toujours de la valeur ajoutée ultra pertinente ... C'est un vrai ingénieur ce "zozo" ! J'ajouterai aussi que les centrale à charbon récentes sont aussi à 50% de rendement. Elles sont diabolisées alors qu'au final elles peuvent être relativement vertueuses.

    Maintenant il ne faut pas diaboliser l'électrique comme je le faisais d'ailleurs il y a encore quelques années. Et l'exemple de monsieur montre qu'au pire des cas l'électrique est à peu près similaire. Encore une fois voyez l'article mis en lien, il s'agit de constater la différence de rendement entre thermique et électrique à partir de 100 kWh de combustible fossile.
    Maintenant il faut aussi prendre ne compte la réalité et le fait que beaucoup de gens utilisent mal leur transmission (défavorisant encore plus le rendement des thermiques) et l'usure des moteurs thermiques qui amène aussi une baisse de rendement (à ce propos je supporte de moins en moins toutes ces autos qui fument et qui puent, aggravé depuis que je roule en électrique).

    Maintenant votre mix énergétique amène un peu de confusion car on se fiche un peu du rendement de la centrale nucléaire (qui vient aggraver le bilan), car elle ne produit pas de CO2 ni de pollution aérienne si on omet sa construction et les "fourmis" qui viennent y travailler en thermique (certes il y a aussi des choses à enfouir par la suite ..).
    Du coup je préfère encore une électrique même si le rendement était inférieur comme vous cherchez à le prouver, car dans l'air de ma planète il y aura moins de mauvaises choses.

    Pour finir, l'avantage de l'électrique est qu'elle est nourrie par des centrales nettement meilleures en terme de rendement et bien mieux entretenues que les véhicules particuliers. Rappelons que c'est 20% de rendement à l'utilisation une thermique, en raison de la transmission et du pic de couple (rendement max) qui ne ne situe que sur une très faible portion du compte tours. Quand je vois toutes les voitures qui fument anormalement (indiquant un fonctionnement anormal et non optimal), je me dis que pour certains ce rendement doit descendre à 10/15% ...

    Franchement, après des années à utiliser l'électrique, il est d'une évidence indéniable que c'est supérieur à tous les niveaux (avec notamment un rendement qui reste toujours optimal du début à la fin de vie).
  • Par murm (2023-10-08 22:39:03) : Bonsoir et merci pour les précisions !
    Je saurais pour l'an prochain que je dois enlever l'étape des batterie ce qui améliorera encore le bilan électrique ;)

    L'objectif de l'activité était de montrer aux élèves qu'avec un changement de technologie on voit transfert de pollution dans l'analyse du cycle de vie (on a enlevé de la pollution dans la partie émission de GES mais on a un impact plus élevé sur l'indicateur consommation d'énergie) mais que cette augmentation très raisonnable était toujours intéressante en comparaison de la forte baisse des GES.

    (Vos remarques sont très pertinentes mais mes élèves me maudiraient si je complexifie ne serais-ce qu'un chouilla cette activité ^^ )

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