Tesla et le FSD en Europe : grosse annonce désavouée dans la foulée ?

Dernière modification : 28/11/2025 -  0


L’épisode est typique de Tesla. D’un côté, une annonce tonitruante sur l’arrivée prochaine du FSD supervisé en Europe, presque présentée comme acquise. De l’autre, un régulateur, le RDW hollandais, qui vient refroidir l’ambiance en précisant qu’aucun feu vert n’a été donné. Au final, il ne s’agit que d’une démonstration prévue en février, l’autorisation concrète étant encore loin.

Entre temps, certains observateurs parlent carrément d’humiliation pour Tesla, qui a vendu un peu trop vite l’arrivée du FSD en Europe avant d’être recadré publiquement par l’autorité censée valider tout ça. Forcément, ça laisse des traces au niveau de l’image.

Une annonce en grande pompe, un régulateur qui rectifie

Dans sa communication, Tesla a laissé entendre que le FSD supervisé serait enfin opérationnel en Europe dès 2026, en s’appuyant sur l’homologation pilotée par le RDW. Le message implicite était simple : les barrières tombent, l’Europe s’ouvre, tout est en marche.

Sauf que le RDW a vite remis le cadre : il existe bien une échéance en février, mais elle concerne une démonstration, pas une homologation. Aucune approbation formelle n’a été délivrée, aucun accord définitif n’est signé. On en est au stade de l’évaluation, pas de la validation.

Dans ce contexte, certains commentateurs parlent d’un léger retour de bâton pour Tesla. Le constructeur a communiqué comme si le match était gagné, avant que le régulateur ne vienne rappeler que c’est lui qui tient le sifflet.

Ce que changerait vraiment une homologation du FSD

Si, au bout du processus, le FSD supervisé est autorisé, Tesla changera de catégorie en Europe. On passerait d’un Autopilot considéré comme une aide à la conduite un peu avancée à un système de conduite semi-automatisée qui gère beaucoup plus de situations.

Mais il faut rester clair : en Europe, on sera sur du niveau 2 ou 2+ supervisé. Le conducteur reste responsable, il doit surveiller la route, garder la capacité à reprendre la main, et le système doit le traiter comme tel. Il n’y aura pas de “voiture autonome” au sens plein du terme, juridiquement ce concept n’existe pas encore dans le cadre général d’homologation.

Le vrai blocage : les règles UNECE et européennes, pas un pays

Le problème central pour Tesla ne vient pas d’un Etat en particulier, mais du socle commun de règles techniques adoptées dans la zone UNECE (dont fait partie l’Union européenne). Ces textes encadrent la direction, les systèmes d’assistance, l’automatisation partielle et la surveillance du conducteur.

On peut les résumer en trois grandes règles.

1. La direction et les fonctions de braquage automatisé (UN R79)

La réglementation UN R79 encadre tout ce qui concerne la direction assistée par des systèmes électroniques, avec la notion d’ACSF (Automatically Commanded Steering Function). Elle définit plusieurs catégories de fonctions qui “tournent” le volant à la place du conducteur, notamment les fonctions de maintien dans la voie sur de longues périodes (catégorie B2, typiquement le lane centering et l’Autosteer de Tesla).

Cette réglementation impose par exemple :

  • que le système reste une assistance, et non un remplacement total du conducteur ;
  • des limites sur l’angle de braquage et la vitesse à laquelle la direction peut être commandée automatiquement ;
  • la nécessité de vérifier que le conducteur reste impliqué (par exemple en surveillant qu’il garde les mains sur le volant ou qu’il réagit aux sollicitations).

C’est exactement là que les choses se tendent pour Tesla : son FSD est pensé pour aller très loin dans la prise en charge de la trajectoire, y compris en ville. En Europe, la base règlementaire a été conçue pour des aides encadrées, sur des scénarios bien définis, pas pour un système qui essaye de tout gérer partout.

2. L’automatisation plus poussée sur voies rapides (UN R157 ALKS)

Pour aller au-delà du simple maintien dans la voie, il existe la réglementation UN R157 sur les Automated Lane Keeping Systems (ALKS), qui vise les systèmes d’automatisation jusqu’au niveau 3 dans certaines conditions bien définies (ODD, pour “Operational Design Domain”).(UNECE)

Quelques points clés :

  • Au départ, l’ALKS était limité au début à 60 km/h, sur des routes de type autoroute (ce qui fait léger et représente un risque réel), sans piétons ni cyclistes, avec séparation physique des voies.
  • Des amendements récents permettent désormais de monter jusqu’à 130 km/h, toujours dans un cadre très encadré (infrastructure de type voie rapide, marquages clairs, etc.).
  • Le système doit être capable de gérer une manoeuvre minimale de risque (MRM) : si le conducteur ne répond plus, la voiture doit être capable de ralentir, se stabiliser et s’arrêter en sécurité.
  • Les changements de voie automatisés sont autorisés, mais dans des conditions très précises : validation de l’environnement, clignotant, temps minimal de manoevre, restrictions sur les angles de braquage et la dynamique du véhicule.

En pratique, ça veut dire que si Tesla veut faire valider un FSD qui se comporte comme aux Etats-Unis, il faut le découper en morceaux et le restreindre à un ODD européen très strict : pas de freestyle en zone urbaine dense, pas de comportements “créatifs” aux intersections, et une gestion des vitesses en ligne avec ces plafonds.

3. La surveillance du conducteur et les systèmes d’assistance (DCAS, DMS, ELKS)

Le troisième bloc, c’est tout ce qui gravite autour des systèmes d’assistance au conducteur (DCAS, Driver Control Assistance Systems) et de la surveillance du conducteur. Une nouvelle réglementation UN R171 encadre ces systèmes de niveau 2 avancé, et rappelle noir sur blanc que le conducteur reste responsable et doit surveiller en permanence l’environnement.(stradalex.eu)

En parallèle, le cadre européen impose plusieurs choses :

  • L’UE a rendu obligatoires des systèmes de surveillance de la somnolence et de la distraction (DMS) sur les nouveaux modèles, avec des exigences renforcées à partir de 2024.(Mobility & Transport - Road Safety)
  • Les Emergency Lane Keeping Systems (ELKS) doivent intervenir pour corriger la trajectoire si le véhicule quitte involontairement sa voie entre environ 70 et 130 km/h, avec des critères précis de détection, de temps de réaction et de marge de dépassement de la ligne.(interregs.com)

Traduit en concret : un système comme le FSD supervisé doit prouver qu’il ne “débranche” jamais le conducteur. Il doit le surveiller de manière continue (caméras, capteurs sur le volant, avertissements gradués) et respecter toutes les logiques de reprise en main. Impossible de laisser quelqu’un regarder un film pendant que la voiture se débrouille toute seule dans le trafic, ce qui est pourtant l’imaginaire vendu autour de l’autonomie.

Ce que ça implique pour Tesla

Tant que Tesla n’aligne pas son FSD sur ce cadre, certaines fonctions resteront bloquées ou limitées en Europe :

  • parties urbaines très automatisées bridées ou interdites dans un premier temps ;
  • comportements dynamiques (changements de voie agressifs, prises de décision “à l’américaine”) refusés par la validation ;
  • obligation d’un driver monitoring très intrusif, avec rappel permanent que c’est au conducteur de rester en contrôle.

La marge de manoeuvre est faible. On comprend vite pourquoi ça traîne depuis des années : la vision produit de Tesla va plus loin que ce que la reglementation accepte pour l’instant.

Malgré le recadrage, le FSD finira par passer

Malgré tout il faut rester lucide : même si Tesla vient de se faire reprendre publiquement par le RDW, ce n’est pas une fin de non-recevoir. Au contraire, toute la mécanique réglementaire européenne va dans le sens d’une ouverture progressive à des systèmes de plus en plus automatisés. On a déjà les textes pour le niveau 3 sur certaines voies rapides, les DCAS encadrés, les DMS obligatoires, les ELKS, etc. Tout est en train de se mettre en place.

En pratique, la question n’est pas de savoir si le FSD sera un jour autorisé en Europe, mais quand et dans quelles limites. Tesla va devoir rentrer dans le cadre, adapter son système, segmenter les fonctionnalités par type de route et accepter un niveau de supervision très élevé. Ça ne ressemblera pas forcément à la vision “full autonome” vendue dans les présentations marketing, mais ça arrivera.

Pour l’instant, on en est à la phase où Tesla parle trop vite, le régulateur le recadre, et les ingénieurs se débrouillent pour faire rentrer un système très ambitieux dans un ensemble de règles conçues pour être prudentes. La fin de l’histoire est quasiment écrite, mais la girille d’homologation, elle, va être longue.

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