L’action Ferrari a décroché de plus de 14 % à Milan, presque au même moment que la présentation de sa plateforme électrique. Coïncidence ou signe d’un malaise plus profond ? Difficile à dire. Mais le timing laisse penser que le marché n’a pas aimé ce qu’il a vu.
Ferrari a dévoilé la base technique qui servira à ses futures voitures électriques. Une plateforme “skateboard”, avec la batterie intégrée dans le plancher et les modules moteurs répartis sur les deux essieux. Rien de choquant en soi : c’est ce que font tous les constructeurs. Mais c’est justement là que le problème commence.
Cette architecture standardisée éloigne Ferrari de ce qu’elle était. Les châssis tubulaires, les structures légères et les montages moteurs en central arrière, tout cela disparaît au profit d’une base lourde et plate. Une Ferrari qui repose sur la même logique qu’une berline grand public perd fatalement un peu de son âme.
SI le Ferrari aiment les virages, celui qu'on peut voir en angle droit dans l'image du dessus est plus difficile à négocier que les autres ..
Le moteur a toujours été le cœur de la marque. Pas un simple organe mécanique, mais une signature. Un V12 Ferrari, c’est une manière de parler au conducteur, de répondre à chaque pression d’accélérateur.
Avec l’électrique, tout devient silencieux, précis, mais neutre. Le moteur n’est plus façonné ni “accordé”. Il est monté et calibré, comme partout ailleurs. C'est de l'efficacité pure qui dépasse celle des thermiques, mais c'est aseptisé et désormais similaire à du généraliste ...
Non, on n'est pas chez tesla, le monsieur arbore un cheval cabré sur sa combinaison, on doit donc être ailleurs ...
Ferrari essaie de compenser par la simulation : sons retravaillés, vibrations reproduites, mise en scène numérique. Mais ces artifices n’ont pas la même saveur que la mécanique brute. Le caractère du moteur n’existe plus, et sans lui, c’est tout le récit Ferrari qui s’effondre.
Ferrari n’a pas tout détaillé, mais plusieurs éléments techniques ont été présentés. La voiture reposerait sur quatre moteurs électriques )deux par essieu) pour une puissance totale dépassant les 1 000 chevaux (le minimum aujourd'hui pour se faire remarquer, surtout en électrique !). Le 0 à 100 km/h serait abattu en environ 2,5 secondes, avec une vitesse maximale d’environ 310 km/h. Une "banale" Model S y parvient, et fait même mieux ...
La batterie, d’une capacité avoisinant les 120 kWh (tout ça sent bon la légèreté !), fonctionnerait sous 800 volts pour des recharges rapides et une meilleure gestion thermique. L’autonomie viserait plus de 500 km en cycle WLTP. Le poids dépasserait les 2.3 tonnes (tiens, voilà plus de précisions sur la légèreté ..), censé être compensé par une répartition parfaite (près de 50/50) et un centre de gravité abaissé (la blabla habituel de l'électrique).
Ferrari évoque aussi un système de gestion du couple par moteur (torque vectoring) et des roues arrière directrices pour préserver l’agilité (rien de bien nouveau). Le châssis utiliserait largement l’aluminium et les composites, dans une tentative de concilier rigidité, sécurité et dynamisme. Brefn la Tesla Roadster devrait quant à elle bien plus marquer les esprits avec ses turbines SpaceX .. Et je vous invite à lire cet article.
Ca a moins d'allure qu'un V8 ou V12 ... Moteur de lave-linge ?
Les marchés n’ont pas seulement réagi aux chiffres présentés. Ils ont perçu un changement d’identité.
Ferrari n’incarne plus la singularité absolue, mais une adaptation prudente à la tendance. Une voiture électrique Ferrari, c’est un paradoxe en soi : comment rester rare et passionnelle en utilisant les mêmes fondations que tout le monde ?
Le constructeur parle d’innovation, mais les investisseurs y voient surtout une normalisation. Et dans un univers où la rareté fait la valeur, se normaliser, c’est déjà perdre.
La question du poids ajoute une autre couche au problème. Les premières estimations parlent de plus de deux tonnes. On peut équilibrer les masses, corriger les mouvements, ajouter du couple vectoriel et des suspensions pilotées… mais le miracle de la légèreté, lui, ne reviendra pas.
Une Ferrari lourde, c’est un peu comme un sprinteur en costume de plongée : ça avance, mais plus avec la même grâce.
Cette inertie change tout dans la perception au volant. La vivacité, la réponse instantanée, le contact brut avec la route… tout devient plus distant. Et quand on perd la sensation, on perd aussi une partie du prestige.
Ferrari n’est pas la seule à vivre cette mutation, mais chez elle, le choc est plus visible. Parce que tout ce qui la définissait — le moteur, le châssis, le poids, la pureté mécanique — disparaît d’un coup.
Le passage à l’électrique, c’est un changement de nature, pas seulement de technologie. Une marque fondée sur la passion du moteur devient un constructeur d’objets de performance. C’est plus rationnel, plus propre, mais aussi plus froid.
La baisse de l’action n’est sans doute pas qu’une réaction boursière. C’est une traduction émotionnelle : le marché comprend que Ferrari entre dans une ère où l’émotion compte moins que la conformité.
Et c’est peut-être ça, le vrai problème : à force de vouloir survivre dans un monde normé, Ferrari risque de devenir une marque comme les autres.
L’histoire a montré qu’on ne copie pas la passion, on la ressent. Et l’électricité, pour l’instant, ne fait que la simuler.
Porsche a pris de l’avance sur l’électrique, avec la Taycan puis le Macan EV. Mais les résultats sont loin des attentes. Les ventes reculent, notamment en Chine, et les versions électriques ne compensent pas le déclin des modèles thermiques. Le marché semble se lasser plus vite que prévu, et les modèles électrifiés subissent déjà des décotes spectaculaires sur le marché de l’occasion.
Même pour une marque solide et légitime comme Porsche, la transition se révèle plus risquée qu’espéré. L’électrique exige une image irréprochable, une rentabilité maintenue, et une vraie cohérence de marque. Faute de quoi, la confiance s’érode rapidement. C’est peut-être la leçon la plus claire à observer pour Ferrari : arriver plus tard n’est pas un problème, à condition d’arriver juste.
La chute du titre Ferrari ne tient sans doute pas qu’à la présentation de la plateforme électrique. Plusieurs signaux ont pu nourrir la méfiance du marché. Les prévisions financières d’abord, jugées trop timides pour une marque valorisée comme un produit de luxe. Ferrari a revu à la baisse la part de modèles 100 % électriques prévue pour 2030, tout en affichant des objectifs de revenus et de marges moins ambitieux que prévu. Les investisseurs attendaient un discours conquérant, ils ont eu une prudence de constructeur. Le contexte n’aide pas non plus : la demande mondiale ralentit, le luxe marque le pas en Chine, et les coûts liés à l’électrification restent élevés. Ajoutons à cela un risque d’exécution technique et d’acceptation commerciale (lancer une Ferrari électrique sans dénaturer la marque n’a rien d’évident). Le marché a sans doute aussi réagi à un signal plus symbolique : celui d’une marque mythique qui, en cherchant à s’adapter, donne l’impression de s’éloigner de ce qui la rendait unique.
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