
Parmi toutes les pistes explorées pour augmenter l’autonomie des voitures électriques, la suppression de l’anode fait partie des plus prometteuses. Le principe paraît contre-intuitif, car une batterie a forcément besoin de deux électrodes. Pourtant, cette méthode dite « anode-free » commence à convaincre les laboratoires du monde entier.
Dans une batterie lithium-ion classique, on trouve :
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Lorsqu’on supprime l’anode, la cellule ne contient plus qu’une fine feuille de cuivre servant de collecteur de courant. L’anode, au sens strict, n’existe donc pas encore. Elle se forme lors de la première charge : les ions lithium quittent la cathode et viennent se déposer directement sur le cuivre, créant une couche de lithium métallique qui devient l’anode active.
On parle de dépôt in situ, ou d’anode « formée à la demande ». Ce mécanisme permet de supprimer environ 10 % de la masse de la cellule et de libérer jusqu’à 15 % du volume interne, des gains loin d’être négligeables pour un accumulateur.

Les études récentes montrent qu’une batterie sans anode peut atteindre une densité énergétique de 450 à 500 Wh/kg, contre environ 250 à 300 Wh/kg pour les cellules lithium-ion classiques. C'est à dire qu'à taille égale, l’énergie stockée pourrait augmenter de 60 à 80 % selon les configurations.
Cela ouvrirait la voie à des véhicules électriques dépassant les 900 km d’autonomie sans agrandir le pack, ou au contraire à des batteries plus légères pour la même distance. Cette technologie pourrait aussi réduire le coût global, puisque la production de graphite représente environ 7 % du prix d’une cellule et nécessite un traitement thermique énergivore.
Le principal obstacle tient à la stabilité du lithium métallique. Lors de la formation de l’anode, le lithium a tendance à se déposer de manière irrégulière, formant des structures filamenteuses appelées dendrites. Ces dendrites peuvent traverser le séparateur et provoquer des courts-circuits internes.
Pour contenir ce risque, les chercheurs travaillent sur plusieurs leviers :
Malgré ces progrès, les prototypes dépassent rarement 150 à 200 cycles complets avant dégradation notable, contre 1 000 à 1 500 cycles pour une batterie lithium-ion classique. C’est la principale barrière à une industrialisation à grande échelle.
Les batteries sans anode sont souvent vues comme une étape intermédiaire vers la batterie lithium-métal ou la batterie solide. Les densités visées sont similaires, mais l’électrolyte solide remplacerait le liquide actuel pour éviter la formation de dendrites.
Plusieurs laboratoires annoncent déjà des cellules anode-free à 400 Wh/kg capables de tenir plus de 400 cycles, mais ces résultats ne sont obtenus qu’en laboratoire, dans des conditions très contrôlées. La mise au point d’une version stable à température ambiante et résistante à la charge rapide (supérieure à 2 C, soit une charge complète en moins de 30 minutes) reste un objectif encore hors de portée.
De nombreuses équipes planchent sur le sujet : des universités américaines (Stanford, MIT), européennes (Karlsruhe, Cambridge) et asiatiques (Tsinghua, Kyoto). Côté industriel, plusieurs fabricants de cellules y voient un prolongement naturel du lithium-ion, avec l’espoir d’atteindre le double de densité énergétique d’ici 2030.
Les prototypes les plus avancés utilisent une cathode NMC 811 (80 % de nickel, 10 % de manganèse, 10 % de cobalt) et un électrolyte contenant des solvants à base de carbonate d’éthylméthyle. Le rendement coulombique mesuré dépasse 99,5 % sur les premiers cycles, mais chute ensuite à mesure que le dépôt de lithium devient hétérogène.
Les batteries sans anode ne suppriment pas vraiment l’anode : elles la déplacent dans le temps. L’anode se crée naturellement lors de  la première charge, ce qui permet d’économiser de la matière et de gagner en  densité énergétique.
Les gains potentiels sont énormes (+25 % à +80 % selon les sources) mais les  problématiques de stabilité et de durée de vie restent importantes.
Si les chercheurs parviennent à maîtriser le dépôt de lithium métallique sans formation de dendrites, cette technologie pourrait marquer une étape majeure vers la batterie lithium-métal. Pour l’instant, elle demeure un concept prometteur mais encore expérimental, que seuls quelques prototypes réussissent à faire fonctionner durablement.
L’idée de fabriquer une batterie sans anode n’est donc pas un non-sens, mais un pari audacieux : celui de repousser les limites physiques de la chimie lithium-ion sans tout réinventer. Et si le pari est gagné, ce sera peut-être la dernière génération avant l’avènement, enfin, de la batterie solide.
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