Les hybrides deviennent-elles des usines à gaz peu fiables ?

Dernière modification : 07/10/2025 -  0


Pendant longtemps, les constructeurs se contentaient de placer un moteur électrique entre le moteur thermique et une boîte classique. C’était une solution simple : on prenait une base existante et fiable (boîte à convertisseur ou double embrayage), on ajoutait l’électrique entre le moteur et la boîte et le tour était joué.
Mais depuis peu la tendance change, les ingénieurs conçoivent des transmissions hybrides dès le départ, en intégrant le moteur électrique au cœur même de la boîte. L’idée paraît logique : optimiser le rendement, réduire l’encombrement et mieux gérer la répartition de couple. Bref, avoir des boîtes nativement hybrides. En réalité, cela transforme parfois ces organes en véritables puzzles mécatroniques où chaque élément dépend étroitement des autres. Et plus c’est complexe, plus c’est fragile.

Renault E-Tech : une boîte qui jongle en permanence

Chez Renault, la boîte E-Tech illustre parfaitement cette complexité. Contrairement à une transmission classique, elle ne possède aucun embrayage entre le moteur et la boîte. Tout repose sur des crabots et deux moteurs électriques : un principal pour la traction, et un second servant à synchroniser les rapports et à lancer le moteur thermique.
Résultat, la boîte doit se comporter comme un jongleur en mouvement permanent. Elle doit décider à chaque instant quel moteur utiliser, comment transmettre le couple, quand enclencher le thermique ou le désactiver, et tout cela sans jamais faire caler l’ensemble. Le tout en tenant compte du niveau de charge de la batterie, de la vitesse et de la demande du conducteur ...
Quand tout va bien et que le contexte n'est pas trop difficile, le système fonctionne assez bien. Mais dès qu'une combinaison contextuelle devient plus difficile ou que la batterie faiblit trop, la logique se dérègle : les transitions deviennent plus brutales, la voiture peut perdre sa progressivité, voire se mettre en défaut si la demande est trop forte. Plusieurs utilisateurs ont aussi signalé des comportements incohérents : passages de rapports imprévisibles, pertes temporaires de motricité, ou fonctionnement chaotique quand le moteur électrique n’a plus assez de réserve pour assurer la synchronisation.
Le YouTuber de Planète GT a d’ailleurs réussi à pousser la boîte dans ses retranchements : après plusieurs fortes accélérations successives, le système a perdu le fil, avec une coupure quasi complète de la transmission et une alerte disant qu'il y a un risque de casse de la boîte. Une scène rare, mais révélatrice de la sensibilité du dispositif.
L’E-Tech n’est donc pas une boîte “ratée”, mais elle repose sur un équilibre si fin qu’elle peut perdre toute cohérence dès que l’un de ses éléments (batterie, logiciel ou capteur) faiblit. Il faut donc la ménager ...

Stellantis e-DCS6 : une double embrayage revue, mais pas forcément corrigée

De son côté, Stellantis a fait un autre pari avec la e-DCS6, conçue avec Punch Powertrain. Ici, on parle d’une boîte à double embrayage repensée pour accueillir un moteur électrique directement dans son carter sans perdre trop de rapports (limités à 4 sur l'E-Tech de Renault). L’idée est double : électrifier sans augmenter la taille, et surtout réduire les coûts de fabrication, puisque la même base sert aussi pour les versions non hybrides (qui sont donc plus petites, avec moins de pièces pour le même ombre de rapports).

L'e-DCS6 de Punch Powertrain se distingue par une architecture interne simplifiée qui réduit d’environ un tiers le nombre de composants d’une boîte double embrayage classique. Pour y parvenir, l’équipementier a choisi de limiter le nombre de rapports mécaniques réels, puis de les “doubler” grâce à un système de démultiplication supplémentaire intégré à l’embrayage principal.
Concrètement, chaque rapport peut être exploité sous deux démultiplications différentes grâce à un train épicycloïdal verrouillable. On obtient ainsi davantage de rapports sans multiplier les pignons ni les arbres. La boîte compte donc trois embrayages : un pour relier ou isoler le moteur de la transmission, et deux autres pour gérer les rapports selon la démultiplication choisie. Cette conception compacte et économique explique pourquoi Punch Powertrain a pu proposer une boîte hybride légère et peu coûteuse à produire.


Mais ces gains sur le papier ont un revers. Pour compacter la boîte, certains organes ont été simplifiés, ce qui la rend mécaniquement moins robuste que les doubles embrayages traditionnelles. Et comme toujours, quand on réduit les coûts dans la conception, on touche vite aux limites de la fiabilité.
Les premiers retours font état de passages hésitants, de bruits métalliques à froid, de vibrations, voire de calages en manœuvre. Certains conducteurs évoquent aussi une sensation de lenteur dans les changements de rapports, surtout en conduite urbaine.
Si la base est intéressante, la mise au point reste perfectible. Plusieurs mises à jour logicielles ont d’ailleurs été diffusées pour corriger des transitions mal gérées. Cette boîte équipe déjà de nombreux modèles du groupe (Peugeot, Citroën, Opel, DS…), et son comportement très variable selon les versions montre bien qu’elle cherche encore son équilibre.

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

Toyota a choisi une tout autre philosophie. Son e-CVT à trains épicycloïdaux ne comporte pas d’embrayage et fonctionne sans rupture de couple. C’est vieux, simple, mais toujours redoutablement efficace. Nissan avec son e-Power, Honda avec son e:HEV et Mazda avec son e-Skyactiv suivent la même logique : une architecture rationnelle, robuste, et facile à calibrer.
Ces systèmes fonctionnent depuis des années sans casser la tête de leurs ingénieurs ni celle des propriétaires. Et c’est là tout le paradoxe : pendant que certains perfectionnent la simplicité, d’autres se compliquent la vie avec des systèmes sophistiqués mais instables.

Conclusion

Les boîtes hybrides modernes comme les E-Tech et e-DCS6 sont le reflet d’une époque où l’ingéniosité finit parfois par tourner contre elle-même. L'objectif est de réduire les coûts de fabrication quitte à transformer ces transmissions en usines à gaz (car complexité ne veut pas forcément dire coût de revient plus important, le but ici est d'économiser de la matière). Renault a voulu créer une boîte sans embrayage, Stellantis a voulu électrifier un double embrayage en revoyant son architecture : dans les deux cas, le résultat est un ensemble sensible, dépendant de la moindre variation de charge, de température ou de mise à jour logicielle.
À force de vouloir tout réinventer, on finit par fabriquer des mécaniques aussi brillantes que capricieuses. Et tant que la fiabilité n’est pas au rendez-vous, ces systèmes risquent surtout d’éloigner les automobilistes de l’hybride au lieu de les en rapprocher. Et c'est sans doute une bonne chose, car tout ce qui a un moteur thermique devrait désormais être abandonné il me semble ...

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