Equipementiers européens aux aboies : analyse

Dernière modification : 10/06/2025 - 4


Il ne faut plus se le cacher : quand un domaine industriel commence à tanguer en Europe, les pouvoirs publics observent le naufrage en silence. Et dans le cas des équipementiers automobiles, on ne peut même plus parler d’inaction. Il s’agit ici d’un sabotage en règle. Volontaire ? C’est la vraie question. Car les erreurs sont désormais trop nombreuses, trop systématiques, trop grossières pour être attribuées à la simple incompétence.

Une industrie étranglée par la Chine et par nos propres lois

Alors que la Chine arrose ses industries de subventions, du niveau municipal jusqu’au sommet de l’État, l’Europe continue de dérouler le tapis rouge aux importations à bas coût. Résultat ? L’Union européenne, qui affichait un excédent de 7,7 milliards d’euros sur les pièces détachées automobiles en 2014, est désormais en déficit, avec 21 milliards d’euros dans le rouge en 2024, notamment à cause des batteries lithium-ion quasi exclusivement importées.

Pire encore : les droits de douane censés freiner les importations chinoises ne s’appliquent pas aux sous-traitants. Autrement dit, les constructeurs automobiles continuent de se fournir en Chine sans entrave, écrasant un peu plus les petits fournisseurs européens à chaque bon de commande.

L’appel désespéré des équipementiers

Face à cette situation absurde, le CLIFA (Comité de Liaison des Industries Fournisseurs de l’Automobile) lance un SOS. Ils demandent une règle d’origine claire : au moins 80 % de pièces fabriquées en Europe pour qu’un véhicule soit considéré "made in Europe". C’est le minimum vital pour éviter une hémorragie. Car à ce rythme, 35 000 à 45 000 emplois sont directement menacés, principalement dans les PME qui sous-traitent pour les grands équipementiers.

À l’étranger, les choses sont plus simples : les États-Unis, l’Inde, le Brésil, le Canada… tous ont instauré des politiques de contenu local (PCL). Plus de 5 300 mesures de ce type ont été mises en place dans le monde entre 2009 et 2024. L’Europe ? Moins de 1 %. On touche là à l’aveuglement stratégique pur et dur.

Le PCL, ou politique de contenu local, est un outil qui impose qu’un certain pourcentage de la valeur d’un produit soit réellement fabriqué sur le sol national (ou européen, selon le périmètre). Ça permet de soutenir les chaînes de production locales, d’ancrer les emplois dans le territoire, et d’éviter que le « made in » ne soit une simple illusion maquillée par de l’assemblage final.

Dans les faits, ce genre de mesure est massivement utilisée partout ailleurs dans le monde. Les États-Unis, le Brésil, l’Inde ou encore la Chine en font un pilier de leur politique industrielle. La Chine, en particulier, combine les PCL avec des subventions massives, ce qui explique en grande partie sa domination. Plus de 5 300 PCL ont été adoptées dans 57 pays entre 2009 et 2024.

Mais en Europe ? Rien. Moins de 1 % de ces mesures. Comme si l’idée même de protéger nos usines était taboue. Comme si vouloir produire localement était un gros mot. On préfère laisser les usines fermer, tant qu’on peut continuer à importer bon marché.

Des règles du jeu volontairement défavorables ?

Là où ça devient troublant, c’est qu’on ne peut même plus invoquer la naïveté ou de l'incompétence. Cela fait des années que les industriels alertent. Et à chaque fois, la réponse des institutions européennes est soit molle, soit inexistante. Le problème n’est plus économique, il est politique. Et il oblige à poser une question dérangeante : nos dirigeants veulent-ils vraiment défendre notre tissu économique ? Ou sont-ils le bras armé d’intérêts extérieurs ?

Quand une élite politique pousse la désindustrialisation, ignore les signaux d’alerte, laisse partir les savoir-faire, et sabote ses propres chaînes de valeur… cela finit par ressembler à autre chose qu’à de la maladresse. Cela ressemble à une mission. Une sorte de cheval de Troie venu dans les rouages de l’UE, méthodiquement.

La France, pionnière dans l’abandon industriel

Et bien sûr, la France montre la voie dans cette logique suicidaire. Chez nous, le prix reste le seul critère dans les appels d’offres. Les acheteurs des constructeurs ou des groupes équipementiers privilégient systématiquement le moins-disant, quitte à commander des pièces à 10 000 km de là, fabriquées dans des conditions opaques. Pendant ce temps, l’Italie impose des critères de qualité dans ses appels d’offres. On voit bien que l’abandon n’est pas une fatalité. C’est un choix.

Un choix assumé, ou téléguidé ? Là encore, difficile d’écarter l’hypothèse d’un renoncement savamment orchestré. Car les décisions sont trop convergentes, trop cohérentes dans leur nocivité.


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